• CJ28 chronique du 2ème confinement - jour 28

     

    Écrits au jour le jour s'échappant vers la fiction, dans l'espace-temps du reconfinement...

     

    CJ28 chronique du 2ème confinement - jour 28 

    Le moteur du SUV a des ratés. Le moteur va s'arrêter. La campagne où il est échoué est un désolé de gris qui tente ses différences alors que la nuit vient. A ras, les singularités, à ras, les espérances. Elle fauchera tout.

     

     

    C'est le b-a-ba de l'auteur que d'assembler les images, avant d'aller plus bas, là où les linguistes pauvres disent que le signifié rejoint le signifiant.

     

    D'autant que l'offre surabondante, aveuglante, le déborde. Une imagination qui n'est pas la sienne menace de recouvrir, d'anéantir son territoire, son joyau personnel. Il y a quelque chose de profondément malsain dans le déversement d'images « taillées », comme dirait la Bible.

    Quelque chose imite l'art, en tant que l'art re-produit. Sauf qu'il reproduit de la différence. L'artiste créateur de mots ne singe pas les bouffons de son quartier. Il pioche au creux faible des signes, dans leurs sonorités préhensiles, dans ses peurs indicibles et dans les fragments intimes des autres scribes de cet être fatalement incomplet. Homo. La grotte de Chauvet doit disparaître à son heure, pour que l'Humanité demeure. L'auteur est sourcier.

     

    Les ersatz déferlent. Ersatz de tout. De paroles, d'êtres, de sentiments, de confessions, de meurtres et d'avenir. Ils noient peu à peu l'idée même d'humanité. Rappel. Oui, l'humanité imite, oui l'humanité tremble. C'est un bonheur de la voir hésiter, tomber à côté, sur autre chose et se relever avec d'autres jambes.

     

    Mais toujours me revient cette sensation de répétition inutile. Elle prend racine dans ce raz-de-marée permanent, l'étouffante avalanche de paroles et de clichés. Désordre le plus complet. Décharge publique. Saturation des capteurs.

     

    Alors, où en est la nuit ? Où en est l'épidémie ? C'est un être qui pourrait être affecté, mais déjà malade, qui écrit ces mots. S'enfoncer est une maladie, déclarer que STOP est un panneau de carton est une maladie, déclarer qu'il inutile de déclarer tout en. Est une maladie virale.

     

    La bataille. C'est une bataille. Nous ne la menons pas. Quand je « nous », c'est un nous évident. Pas besoin d'appeler des universitaires spécialistes du « nous ». Nous on est placé sous. Sous les décharges, et la démission de la vie nous guette. Nous, c'est avant tout « nous » contre.

    Contre tout ce qui alimente la décharge.

     

    On se décharge beaucoup sur nous.

    On nous grime, d'abord. On parle « nous » ensuite, on nous bâillonne avant de nous briser. On continue, par précaution, à déverser de l'angoisse via les bennes médiatiques. Les hauts-parleurs du camp sont à fond. Tempo 150 bpm.

    Prend ta vie en main. Prend ton porte-monnaie. Noël crétin. Va prier, enveloppe ton corps dans les gestes-barrière, offre-toi au Seigneur parfaitement masqué. Gèle tes mains jointes dans la Mosquée, l’Église, la Synagogue, le Temple. Sauve-toi toi-même en prêtant attention aux autres. Tu es libre à un mètre de distance. Recule, envole-toi.

     

    Je répète, je me répète. Pas pareil. Je suis en train de penser à Montaigne et à Nike air. La synchronicité n'est que la magie de la rationalité . Rapport pas encore déversé dans la décharge. Pas pareil.

    Paradigme tendanciellement complotiste. J'entends déjà les phonèmes de fer. Tais-toi, Tais-toi, tu es mort du covid et tu ne le sais même pas.

     

    SUV absorbé, dissous dans une forêt vierge de tout arbre pensable. Je veux répéter, psalmodier mes mots et faire monter ma Maison-Dieu, face à la lumière.

     


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