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    Un peu écrasé par l'autorité du vocabulaire de la techno-science. L'idée est de poser quelques-uns de ces monuments textuels comme barrière et guide à la fois, pour voir vers quel chemin le vocabulaire de la géométrie ou de la physique conduit, comment s'exprime la tension entre humanité et représentations théoriques.

    La série devrait comporter 24 occurrences, ou plus, le voyage étant le chemin. 

     

     

     

     

     

    Ꝏ i j'étais peintre, je m'essaierais à représenter l'infini. Avec la certitude joyeuse d'errer de tentatives boueuses en expériences lunaires, de m'oublier enfin, vain tâcheron devant la grandeur.

     

    L'infini excède, et l'humain lui-même ne rêve que d'excéder ce qu'il ne peut regarder en face, ni même réellement embrasser, sa congénitale nature, être un et dispersé à la fois, son infinité brisée qu'il poursuit sans cesse.

     

     

    Certains chuchotent dans les forêts irradiées, qu'il persiste comme ces plantes dévoyées qui ne savent plus quel est leur règne mais s'accrochent au vent, au roc et même à l'invisible qui les ronge.

     

    L'humain veut excéder sa misérable existence, surpasser, oublier deux bras, deux jambes, un sexe et une tête qui réinvente sans cesses ses fictions de réalité. Il ne veut pas être juste ce qu'il est, une grégarité dédaignée. Il veut de l'amour pour cimenter la faille qui le traverse. Il persiste à vouloir être ce qu'il n'est pas, ce qu'il ne sera jamais.

     

     

    Alors il pousse comme la plante, et lui poussent des bourgeons, enfants excédés comme lui. D'autres lui-même singuliers, caricatures de ce qui remue au fond de son rêve, le temps qu'ils réalisent ce qu'ils sont et la taille du rétroviseur.

     

    Alors il fait. Mélange pensées, désirs et quelques lambeaux du rêve qui l'étire. Ses monuments lui ressemblent tous. Tous excessifs, dérisoire. Pas un n'est capable de la présence de l'arbre, pas un n'approche la douceur discrète de l'herbe. L'herbe simple aux reflets doux. Comme une zone sacrée où peut pousser tout projet parfumé de temps, calé sur la couronne solaire.

     

    Alors il parle. Messages brouillons, contrariés et contredits, que sa bouche laisse fuir. Dans ce creux étroit, entre ses crocs paléolithiques. Ils mâchent les mots, les crocs. Ils mâchent mots et pensées et crachent, au mieux, des bouts d'estomac avec une sauce bilieuse et un vermicelle d'idées.

     

    Alors il voudrait. Un fil de lumière pour encercler le monde obscur et le soumettre à ses fumées. Et bim et boum, la fée allume le chaos, ordonne, commande et prévoit l'après-demain gonflé d'hier. A peine sortis de sa gueule, ses injonctions sont saisies, déchirées par un autre tout en dents. Il pleuvra, le sang de l'homme qui a le malheur de se taire.

     

    Quelques mots réchappent, brillent un moment sur l'herbe qui ondule. Elle voit, elle sait, elle encourage les pauvres tentatives de Janus. Il fait alors temps de merveilles et de suspensions.
    Quelque chose dans les êtres-à-dents applaudit, d'une main. Puis il s'en vont, très vite, faire encore leurs brics et leurs brocs de plus en plus branlants.

     

    Alors quelques mots oubliés, là, au creux de l'herbe. L'homme pressé se penche et, de ses doigts calleux de se colleter aux douves intérieures et aux gongs du monde, de ses doigts gourds, il caresse les fragments allongés sur le tendre vert. Ces mots qui l'excèdent.

     


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