• Sécuritaire routier

    Suite à un stage de reprise de points quelques réflexions sur la "sécurité routière", qui a un coût exponentiel, et un prix...

    Voir MAJ et MAJ II en fin d'article.

     

     

    Sécuritaire routier

     

    Sécuritaire routiern deçà de la répression très visible exercée par les forces de l'ordre, progresse un contrôle institutionnel, ordinaire, qui prend des allures industrielles, je parle de celui qui nous piège chaque jour dans nos rues et que le journaliste lambda ou l'élu appellent « sécurité routière ».

     

    Elle se multiple en voitures banalisées, mobylettes et vélos façon états-unis. En caméras de surveillance, radars et autres technologies panoptiques de répression.

     

     

     

    Heureusement quand le conducteur d'un véhicule a épuisé sa semi-liberté de 12 points, il a le droit de se recapitaliser, moyennant cent cinquante à trois cent euros. Et peut ainsi recommencer à sillonner tranquillement les routes du pays.
    Nos amis à écharpes et autres responsables policiers se rengorgent devant les succès de cette méthode et de ses moyens, qui a largement réduit le nombre d'accidents mortels ou pas depuis une vingtaine d'années. Mais à quel prix ? Et pourquoi y a-t-il un prix, d'ailleurs ?

     

     

     

    Le mauvais conducteur doit payer. J'ai perdu huit points en titillant deux radars, parmi ceux installés en pleine ville de Rouen, j'ai payé cent quatre-vingt euros. En payant, j'ai récupéré ma virginité routière, et tant pis pour ceux qui n'ont pas les moyens. Ils iront grossir les bataillons des sans-permis, ou se passeront de voiture, ce qui aboutira pour un certain nombre à une perte d'emploi, ou la possibilité d'en décrocher un. Certains allégueront certaines circonstances pour expliquer leurs erreurs smais la vérité, aux yeux de nos décideurs, c'est qu'ils sont totalement responsables, totalement coupables.

     

     

     

    Comme l'amende – payable à un tarif qui se majore au bout d'un certain délai - le stage de reprise de points est une image fidèle de l'évolution sociétale qu'imprime nos élus de Marché à notre société. Il n'est rien moins qu'une déformation marchande de la pédagogie citoyenne qui viserait à éduquer plutôt qu'à appauvrir, prévenir la faute, au lieu d'asséner la sanction.
    Aucune difficulté pour trouver un stage de reprise de points sur le Net. Des groupements d'auto-écoles, notamment, en proposent à foison. Les prix vont du simple au double. La plupart du temps nulle indication du contenu du stage. Le critère de choix est donc le prix brut. On peut penser que les autorités auraient pu faire preuve de pédagogie, d'intelligence. Proposer par exemple des stages différenciés suivant les types d'infractions, des abattements conséquentes, voire des exonérations aux conducteurs peu « accidentogènes » - délicieuse terminologie qui induit quelque chose d'inné, de biologique dans les comportements, les personnes - ou une modulation des tarifs suivant le niveau de revenus. Ou encore des stages dans des organismes liés à la circulation et ses problèmes, comme les pompiers, les hôpitaux. Non, manifestement le Marché a convaincu tout nos amis de l'intérêt général qu'il était nécessaire de remplir les poches des officines privés.

     

     

     

    Il faut noter, et le stage que je viens de faire ne déroge pas, que le fil rouge des stages vise toujours à valider la sanction comme ultime horizon cognitif d'armées d'experts, analystes, journalistes spécialisés et autres utilisateurs de vidéos, graphes et jargons divers qui se sont branchés sur cette filière de la « sécurité » routière.
    En tous cas, si la sanction ne ramène pas les conducteurs sur le droit chemin, elle multiplie chaque année le nombre des « délinquants » et sécurise, donc, la rentrée des dividendes dans les poches concernées.

     

     

     

    Dans cette optique où le mercato va de concert avec les postures martiales, on peut penser sans se tromper énormément que la surveillance tous azimuts ira en se développant, en conjuguant des moyens humains toujours plus importants et des technologies de plus en plus coûteuses. Corrélativement se déploiera, se déploie déjà une criminalisation du mauvais usager de la route qui justifie a posteriori la surveillance et le contrôle.
    Et ce contrôle sur-développé devrait laisser de plus en plus place à la répression, ce, pour trois raisons.

     

     

     

    La téléologique des armes

     

     

     

    Traquer des personnes appelle fatalement à les piéger, de la même manière qu'un soldat doit un jour utiliser son potentiel et ses armes. Sinon il y a rupture de la logique de surveillance multiple et rapprochée. Laquelle surveillance fondamentalement transforme le surveillé en proie, donc en ennemi à mettre hors d'état de nuire.

     

     

    L'argent public génère les bénéfices privés.

     

     

     

    Investir les deniers publics massivement comme le souhaite et le pratique l’Intérieur, développe un marché de la surveillance. Les marchands s'engouffrent dans les appels d'offres et créent des matériels de plus en plus évolués que leurs lobbyistes poussent en avant, dans une course sans fin où la rotation des matériels et des moyens humains spécialisés augmente, corrélativement avec les prix. L'appel aux deniers publics se fait plus pressant, la réponse publique, sous pression, ou toute heureuse comme aujourd'hui, plus importante. Ce qui, in fine, accentue la répression comme stade terminal de ces technologies de capture d'images, de signes et finalement de personnes. Leur justification concrète ne peut être que la sanction. S'il n'y avait pas plus de moyens de contrôle, on n'attraperait jamais plus de délinquants routiers. Et comme on attrape plus de délinquants, il faut donc multiplier les moyens de contrôle. Boucle argumentaire qui ne rencontre généralement pas d'opposition, sauf à oser et avoir le temps d'avancer des explications sur la nature de l'action policière et l'organisation d'une société. Argument supplémentaire, la violence de la sanction légitime aussi, par effet de miroir valorisant, la sourde violence du flicage généralisé.

     

     

     

    Le sécuritaire routier roule sur les rails d'une monade intellectuelle au cœur de l'esprit décideur.

     

     

     

    Il ne s'agit plus d'aider les français à mieux se servir de la voiture, des infrastructures routières. L'air du temps est à l'encadrement strict des flots de circulation. Empêcher les débordements, petits et grands, prévenir tout dérapage par un arsenal de lois dissuasives, auxquelles répond une adaptation invasive, limitative, coercitive de la signalisation routière. Enfin, monter le niveau de répression, d'abord par des éléments de langage qui assimilent le mauvais conducteur à un délinquant, voire à un criminel en surfant sur l'indignation de victimes de chauffard, soigneusement hystérisée par les chaînes qui font du bruit avec les chiens écrasés. Ensuite, par des sanctions multipliées et aggravées.
    Lesquelles se traduiront par une ponction financière systématique pour répondre à l'exigence impérative et jamais formulée des politiques : faire des institutions publiques, régaliennes ou pas, des instruments de captation d'argent. Chaque mesure législative, chaque plan de circulation, chaque rapport d'expert en sécurité routière, chaque projet ministériel doit déboucher sur un financement de marchés, mieux, il doit être géré par le Marché, quand ce n'est pas le Marché qui le suscite, le structure et le met en place.

     

     

     

     

    Le stage de reprise de points s'insère parfaitement dans cette entreprise générale d'orientation profit de l'action et des moyens publics. Juteuse étape du tunnel marchand qu'emprunte obligatoirement tout conducteur, il valide les valeurs sécuritaires des décideurs et prévient peu, ou pas, les dérapages futurs des participants car il est vécu, comme l'ensemble du sécuritaire routier, sur le mode de la contrainte et ne possède assez de sens pour modifier les comportements.
    D'ailleurs les responsables de stages, du moins ceux qui m'ont accueilli dernièrement comme auparavant, n'abordent pas la valeur de la sanction qu'ils imposent, en l’occurrence le stage, ne serait-ce que par une statistique montrant s'il y a ou pas « récidive », dans quelles proportions, etc.

     

     

     

    Il s'agit de faire du cosmos routier, un cosmos parfaitement ordonné, où ne circuleront que les conducteurs parfaitement soumis aux règles et aux signaux imposés. Ceux qui auront assez d'argent, de pouvoir pourront eux ignorer la loi commune. Certains appellent ça l'impunité.

     

     MAJ :

    Il est utile de préciser qu'à la fin d'un stage si onéreux, si propagandiste on n'obtient que 4 points. Ce qui permet juste de maintenir la tête hors de l'eau puisque ceux qui s'inscrivent aux stages ont, au mieux, encore 4 points et n'obtiendront qu'un solde de 8 points avec le stage. A la merci, donc, d'un radar mal placé ou autre. Une seule infraction et c'est un nouveau stage promis.

    Comme nul n'est parfait et que la répression de la maréchaussée est dopée par l'idéologie "sécuritaire", nous avons toutes les chances de voir ces stages se renouveler, pour verser ainsi une sorte de pension à l’État qui prélève sa dime, et aux auto-écoles, avec leurs "experts" impliqués dans cette bonne affaire qui frappe particulièrement les pauvres.

     MAJ II

    En 2014 24 176 432 contraventions ont été constatées. Entre 2004 et 2014, le nombre de contraventions a néanmoins été multiplié par 1,6 sur l'ensemble du territoire. 82.65% des infractions sont des dépassements de la vitesse autorisée.
    Évolution des pertes de points par famille : 7,4 millions de points pour excès de vitesse ont été retirés en 2013, soit 5 fois plus qu’en 2002, sur l'ensemble du territoire.
    Évolution du nombre de permis retirés en Seine-Maritime :  1 206 en 2013, 1 799 en 2014, soit  + 49,2%. La Seine Maritime est donc le département français le plus matraqué, et de loin, par les sécuritaires routiers. Triste et onéreux record de nos élus acharnés à nous soumettre.
    Source :


  • Commentaires

    1
    ZIZOU
    Mercredi 1er Juin 2016 à 23:58

    Je suis entiérement d'accords  pour la supression des points,le retrait du permis de conduire et passer un stage en payant pour récupérer son permis c'est une des rares fois que j'approuve les lois quand elles sont bien faite ,car il y a beaucoup de gens qui conduisent sans foi ni loi

    2
    ZIZOU
    Jeudi 2 Juin 2016 à 00:01

    S'il y a qui conque qui peut ajouter quoi que ce soit a mon commentaire je suis entiérement d'accord

     

    3
    Mardi 2 Août 2016 à 11:11

    Merci pour le partage!

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