• Sauver l'UE en enterrant les peuples ?...

    Loin de réaliser ses promesses l'UE se transforme en un camp où la démocratie est mise en vacances. Ce passage par la case dictatoriale sauvera-t-il l'UE en enterrant les peuples, ou l'inverse ?...

    Sauver l'UE en enterrant les peuples ?...

     

    Le pouvoir ne peut rester fort que lorsqu’il est maintenu dans l’ombre ; lorsqu’il est exposé à la lumière du jour, il commence à s’évaporer.

    S. Huntington

     

     

     

     

    93. Nous entrons dans une nouvelle ère qui voit douze pays se lier par le traité de Maastricht.

     

    L'UE décolle les ailes un peu flageolantes.

     

    L'énorme planeur doit additionner ses disparités pour faire un tout plus grand que la somme des parties. Il est le rempart contre la concurrence des USA, la garantie du mode de vie de ses meilleurs membres étendu à tous, la voix d'une démocratie puissante et l'espérance d'un modèle social inégalable.
    Le souffle qui propulse le moteur s'appelle euro. Monnaie commune, elle doit sceller une communauté de destins économiques sans laquelle pas de coexistence pacifique ni de démocratie, nous explique l'UE.

     

     

    Le rêve de fer.

     

    Ce rêve va être jour après jours imprimé au fer dans les têtes par l'ensemble des médias et des politiques du continent. A peine se voit-il adopté qu'il commence à perdre des couleurs. La prospérité espérée n'est pas au rendez-vous. La dynamique commune s'enterre dans les méandres technocratiques d'une UE technocratique. La démocratie s'anémie sous les différences culturelles, les inégalités persistantes et l'inconsistance du projet politique censé donner visée commune.
    L'euro s'avère être un moteur qui alourdit l'avion UE. Il ne remplit pas sa fonction de rempart contre la concurrence extérieure et ne compense pas la perte de l'indépendance que donnait à chaque État une monnaie propre.

     

     

    Déni.

     

    2005. L'UE subit sa première crise sérieuse – référendum TCE – sans en tirer aucune leçon et s'enfonce dans l'arbitraire du rejet du refus qu'avaient apporté plusieurs pays à cette transformation de l'UE en état supranational sur la base d'une économie néo-libérale. On passe en force au sommet de l'Union. Les citoyens ne seront plus interrogés sur leur avenir. La pédagogie n'a pas marché, place à l'imposition.
    Ce, alors que demeurent la défaillance démocratique, la déception sociale, la peur économique et le vide politique. Dans un contexte de crise persistant depuis les années 70. Crise qui ne baisse d'intensité que pour mieux rebondir, sans réponse de l'UE autre que des promesses d'avenir radieux et des injonctions à patienter, subir, souffrir pour les peuples. Les 1%, les bénéficiaires, les « acteurs » de l'économie (cf journalisme de Marché), de la politique et des médias continuent à engranger les bienfaits de la porte et du tiroir-caisse ouverts aux marchands.

     

     

    Les années passent, le planeur décroche.

     

    L'UE nous inonde de sites communiquant son action et sa nécessité. Nous assomme de projets dans un sabir ânonnant à toutes les phrases « concurrence » et « compétitivité ». En réalité, elle ne fait que s'ingénier à emprisonner la vie quotidienne de chacun et libérer les appétits marchands les plus puissants et les plus féroces.
    « Vive le plombier polonais, ! Vive TAFTA ! Vive TISA ! » ne sont que les tout-derniers surgeons d'une longue série de tapis rouge déroulés devant les multinationales. Le parfum de la corruption devient irrespirable comme le diagnostiquent certains observatoires. L'UE s'enfonce dans une dévotion au tout-marché répliquant l'ultra-libéralisme US avec autant d'obstination et d'accélération que cette soumission ne porte pas ses fruits dans les termes promis aux populations. Sauf pour les groupes « leaders » (du Marché). Leurs performances « à l'international » sont régulièrement saluées par les missi dominici politiques et médiatiques comme booster de « la croissance ». Croissance qui ne profite pas à l'euro, déprécié de plus en plus, ni à l'économie des états de l'UE qui se dégrade.
    Faillites et chômage explosent. Les citoyens lucides et rétifs à la descente aux enfers sont ignorés, moqués, écartés. Les consommateurs mis à la diète prolongée, avec paradoxale injonction de consommer plus, alors qu'on bride les salaires, alourdit les taxes et tranche dans les « filets sociaux » qui ne rattrapent plus personne ou presque.

     

     

    2015. L'UE à la dérive ne gère pas plus ses fondamentaux fracassés que l'hypertrophie qu'elle s'est elle-même infligée. Double fuite en avant alignée sur le dogme des puissances économiques et financières comme sur le périmètre géo-stratégique états-unien.

     

    L'UE vit au passé.

     

    Sa logique néo-libérale démontée et même brisée par des performances économiques nulles qui ne tirent pas les peuples d'une misère croissante, au contraire.
    Sa stratégie politique vieille de 50 ans, est basée sur l'antique antagonisme de la guerre froide, spectaculairement illustré par le rappel à la vie, sinon à la conscience, de l'OTAN. La machine dinosaurienne destinée à contrer l'avancée d'une Union Soviétique décédée depuis des lustres et remplacée s'aligne stupidement sur la Russie. Éternelle servilité devant les caprices des cervelles moisies et paranoïaques de Washington. Russie, par ailleurs, partenaire central et essentiel, notamment dans le domaine de l'énergie.
    Une étude comparative entre l'ignorance forcenée des élites de l'Union Soviétique devant l'effondrement, et la cécité morbide des élites UE devant l'implosion annoncée de l'Union éclairerait peut-être ce qui vient.

     

     

    2015, toujours.

     

    Première séquence Terreur du Tout-marché.

     

    La société de marché, que prétendait refuser Jospin et autres ripolineurs du capitalisme, nous y sommes. Bas les masques.
    L'UE agit aujourd'hui exactement comme le FMI. Elle a programmé son action via son instance aussi suprême que non élue, l'Eurogroupe. Ce groupuscule concentre une poignée de monarques encore appuyés sur des États de droits pour mieux agir selon leurs volontés tout à fait privées. Lesquelles sont tout à fait serves des multinationales, bancaires notamment.
    Étape 1. on sur-endette les états les plus faibles par injections massives d'euro. S'ensuivent, comme par hasard, une hausse de la corruption, une évaporation des fonds dans les caisses des banques et des achats massifs d'armements aux généreux états préteurs.
    Étape 2, on sanctionne les états défaillants, aujourd'hui la Grèce.

     

     

    Protocole d'intoxication

     

    Le quidam pensait que l'UE était sans doute défaillante, mais que les sanctions n'étaient que remontrances s'arrêtant aux murs de notre souveraineté.
    L'exemple grec vient de montrer deux choses.
    L'overdose grecque peut atteindre n'importe quel état. Elle est acceptée par ce que le journalisme de caniveau a l'habitude d'appeler « les élites ». Qu'elles soient socialistes grecques ou de droite espagnole, elles décident, elles servent l'élite patronale et se servent ensuite. Elles savent les conséquences, elles recherchent les conséquences que les grecs aujourd'hui. Les citoyens grecs, espagnols, français ou allemands n'ont strictement aucun moyen de refuser. Les élites ont la légitimité démocratique, l'appui médiatique et le soutien patronal.
    Le referendum de 2005 a été analysé et compris par les élites de l'UE. Hier, elles ignoraient le vote populaire en leur défaveur. Aujourd'hui, elles le sanctionnent.
    L'UE au service toujours des mêmes, les multinationales, avec toujours le même souci stratégique de maintenir l'US zone de puissance, a mis les menottes à la Grèce.

     

     

    Démembrement

     

    Elle lui arrache sa volonté. Plié les engagements et les déterminations de son président et de ses ministres.
    Elle lui arrache son argent. Mise sous strict contrôle extérieur des dettes et des fonds pour payer les dettes.
    Elle lui arrache ses institutions de gestions. Déterritorialisé l'organisme de planification grec, qui devient « libre », libre de transformer en statistiques, projets et préconisations les volontés de l'UE.
    Elle lui arrache les joyaux de son économie. Rançonnés les secteurs encore profitables d'une économie grecque déjà écrasée par la pression de la dette et pillée par la poignée de riches autochtones, sourds à la détresse de leur propre peuple.
    Elle lui arrache ses maigres filets sociaux subsistants. Terminée la retraite à un âge décent, fini les pensions de retraites déjà minables. Hausse de TVA, hausse des prix des produits de première nécessité. La mort indirecte assurée pour des dizaines de milliers de personnes.
    Elle lui arrache sa dignité. Exit le patrimoine d'un des berceaux de l'humanité. On va vendre à des loups chinois et US des monuments, des plages, des hôtels et des bâtiments. Le BTP et les agences immo du monde entier se ruent déjà sur la bête. A peu près comme si on vendait la tour Eiffel, on privatisait le Mont Saint-Michel. Ça ne gênerait sans doute pas beaucoup Hollande, qui privatise une plage pour un monarque moyenâgeux et moyen-oriental parce qu'il achète des armes et ne sait que faire de l'argent.

     

     

    La lumière du premier jour éclaire déjà le dernier

     

    Hier s'est effectué le premier coup de force total de l'UE. Elle s'est affirmée, par la voix d'Angela Merkel, comme une institution dictatoriale qui n'a que faire de ses propres règles. Elle a agi sans le nier et sans vergogne, pour un quarteron de riches dont la richesse était déjà insupportable, aujourd'hui totalement obscènes.
    Elle conforte les attentions les plus dangereuses et moralement méprisable des états majeurs qui la composent. A commencer par le nôtre qui s'efforce avant tout de vendre des armes à profusion et de conclure par n'importe quels moyens des accords marchands citoyennement odieux.
    Elle enterre la démocratie dont elle s'est prétendue vecteur, en transformant tout ou partie de son espace en Guantánamo des peuples. Du moins de ceux qui refuseraient de se droguer au prêts FMI/Banque Mondiale/Banques et de payer de leur vie matérielle, comme de leurs libertés, des dettes la plupart du temps odieuses.
    Elle écrase le principe de souveraineté des États, qui prévalait. Les peuples dans un espace géo-culturel, ont le droit on ne peut plus légitime à disposer d'eux-mêmes. Le referendum grec ne disait pas autre chose. L'UE n'est pas un état. Et même. L'histoire ne donne plus à aucun état le droit d'emprisonner ainsi ses minorités sur leur propre sol, dans leur propre monde.
    Elle ignore le paradigme qu'elle a elle-même alimenté, la crise. La crise qui étrangle tous les peuples de l'UE. Elle la creuse encore en imposant à la Grèce – et autres - de nouveaux emprunts destinés à payer les banques, les hedges funds et autres criminels financiers qui ne prêtent que pour mieux saigner leurs bénéficiaires.
    Elle démontre sa propre inanité par son coup de force même. Comme l'action d'un président qui aurait rejeté ses propres engagements, son autorité est devenue odieuse, ses prescriptions insupportables. Le reste de son autorité s'est évanoui.

     

    Elle entame un règne d'oppression, puisqu'elle ne peut désormais que s'appuyer sur ses soutiens, les vampires du Marché, les idéologues grassement payés, les lobbies des multinationales et ses politiques abonnés – pour combien de temps ? – à son soutien.
    Elle est devenue instantanément le moteur de toutes les extrémismes de droite qui n'ont de cesse de dénigrer la démocratie, puisqu'elle représente par excellence l'institution démocratique dévoyée.
    L'Union continuera ses besognes mortifères, s'acharne et s'acharnera sur le plus petit de ses membres, le fera sombrer en coma dépassé pour des intérêts marchands et financiers contraires aux intérêts véritables des peuples.Elle ne sait pas faire autre chose, ni autrement.

    Assurément, ces peuples qu'elle maltraite vont attendre impatiemment une chose de l'UE : sa fin. Elle la déclenchera peut-être elle-même. Qui sait ? On peut tout attendre d'une institution aussi dévastée, et même qu'elle soit contente, au fond, que quelqu’un force son Parlement à voter sa propre dissolution.

     

     

     

     

     


  • Commentaires

    1
    Vendredi 24 Juillet 2015 à 19:42

    Intéressante analyse, pertinent point de vue. Merci

    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :